jeudi 10 octobre 2013

Ces changements sociétaux que les mollahs d'Iran détestent

L'écart entre les évolutions d'une société de femmes et d'hommes et les États est bien connu. En général les sociétés évoluent plus rapidement que les États, d'où l'inefficacité des États, de quelque couleur qu'ils soient. Si les problèmes dans de divers domaines économique, politique, social et autres s’accumulent sans cesse et les contradictions se renforcent, faut - il en chercher les causes ailleurs que dans la manière dont les sociétés sont gérées? Et qui gèrent les sociétés actuelles, si ce ne sont que les États? Incapables de trouver des solutions, mais aptes à faire régresser les sociétés.
Les barrières que les États dictatoriaux posent à la marche évolutive des sociétés sont tellement énormes que l'écart devient abyssal. C'est bien le cas en Iran où les mollahs ont pu imposer un régime moyenâgeux religieux vers la fin du XX ème siècle. Les barrières sont bien là, il suffit de changer l'angle de vue pour constater ce qui passe devant et derrière.
Les mollahs aiment beaucoup les commémorations surtout religieuses. C'est pourquoi l'Iran est parmi les pays où les jours fériés sont nombreux, une trentaine à l'année! Même pour les commémorations, les mollahs imposent leurs règles. Ainsi ils empêchent le "tchaharchanbeh - souri", fête complètement païenne de fin d'année pendant laquelle les gens allument des feux et sautent par dessus. Par contre pour le deuil de l'imam Hossein qui est mort selon un mythe chiite en combattant avec ses 72 hommes contres 72000 ennemis il y a mille cinq cents ans, ils font tout ce qu'ils peuvent pour qu'il y ait plus de scènes de flagellation et de larmes.
A part des journées diverses de naissance et de mort des personnages religieux, les mollahs organisent aussi des semaines à thème. En ce moment, l'on célèbre la semaine du mariage! Sachant que la semaine commence le lundi, la semaine du mariage a débuté le 07/10/2013 et va continuer jusqu'au 13/10/2013. Les propagandistes du régime ont donné un nom à chaque jour de la semaine du mariage, par exemple le 8 octobre est la journée des bienfaiteurs pour le mariage facile des jeunes! L’État islamique inquiet de ce problème du mariage, qui n'en est finalement pas un, a mis en place également un prêt de mariage à taux réduit. Le capitalisme à l'iranienne s'y est adapté et les banques font des publicités pour ce prêt qui est censé faciliter les mariages.
Mais alors pourquoi les mollahs sont tant inquiets pour le mariage des jeunes? Et bien tout simplement parce que la société évolue exactement à l'inverse de ce qu'ils veulent. Selon les mollahs, les jeunes qui ne se marient pas tôt tombent forcément dans le péché. Ils veulent donc arrêter cette hémorragie.
L'évolution démographique de l'Iran en un peu plus de cent ans a été extrêmement rapide à cause des croyances religieuses, du manque d'éducation etc. Alors qu'au début du XX ème siècle l'on ne comptait que 10 millions d'habitants en Iran, on en comptait presque huit fois plus fin 2010. Lorsque les mollahs ont confisqué le pouvoir en 1979, l'indice de fécondité était encore de presque 7 enfants par couple mais à la fin 2010, il est tombé à 1,77, presque 2 enfants. Les femmes ont joué un grand rôle dans cette évolution positive, car elles sont de plus en plus nombreuses à faire des études. Actuellement, il y a plus de six étudiantEs sur dix. Ce phénomène inquiète tellement les mollahs qu'ils ont parlé d'instauration d'un quota sexiste pour que le taux de femmes étudiantes soit moindre. Un autre paramètre est que plus de 70% des gens habitent dans les villes alors que jusqu'aux réformes agraires des années 1960 le rapport était inverse. Les problèmes économiques font aussi réfléchir les couples à faire moins d'enfants. Les mollahs ont essayé d'empêcher la désertification des campagnes en faisant des travaux d'aménagement que le précédent régime n'avait pas faits, entre autre l'électrification des villages, mais depuis trente ans des centaines de villages ont été de fait rayés de la carte car sans habitants.
Pour la première fois, il y a deux ans le taux de mariage était négatif. Il y a un an ce taux est arrivé à - 5,1 % alors dans les zones rurales il était de + 5,9 %.
Les mollahs autorisent les fillettes de 13 ans à se marier, mais l'âge moyen des gens qui se marient ne cesse d'augmenter. Le directeur des statistiques démographiques de l'Organisation des actes de naissance a dit, le 09/10/2013 que l'âge moyen des hommes qui se marient est de 27,4 ans et les femmes de 22,1 ans. Il a précisé que pour 1000 personnes 11 mariages sont enregistrés. Un autre responsable du même organisme avait dit quelques jours plus tôt que le nombre d'hommes de plus de 35 ans et de femmes de plus de 30 ans qui se marient a doublé entre 2005 et 2012. Tout porte à savoir que les gens se marient de moins en moins et de plus en plus tard. Une autre raison pour expliquer cette évolution qui déplaît aux mollahs est que les femmes ont occupé de plus en plus d'emplois divers et variés, ce qui leur a donné une indépendance économique qu'elle n'avait pas autrefois et cela malgré tous les bâtons que les mollahs mettent dans la roue pour empêcher les femmes de travailler.
D'un côté moins de mariage et moins d'enfants, de l'autre plus de divorce et de séparation. Ainsi entre 2004 et 2011 au total 868312 couples ont décidé de se séparer. L'an dernier les divorces ont progressé de 6% par rapport à l'année d'avant. Il y a aussi des couples qui restent ensembles pour des raisons sociales, économiques et des contraintes familiales mais de fait, il n'y a aucun lien sentimental entre les deux.
Un autre phénomène qui ferait sauter les mollahs au plafond est bien celui que l'on appelle "les familles illégales". Les familles illégales ne sont tout simplement que des femmes et hommes qui vivent ensembles sans s'être mariés religieusement ou légalement. Ce sont en fait les couples les plus courageux en prenant en considération les lois islamiques qui qualifient toute relation sexuelle hors mariage d'adultère en prévoyant de lourdes sanctions qui peuvent aller de la flagellation à la lapidation.
Ces réalités démontrent assez bien que les sources des inquiétudes des mollahs ne sont pas anodines. Si pendant plus de trente ans ils n'ont eu aucune réussite à imposer leurs règles d'un autre âge, ils ne pourront jamis empêcher la marche de la société vers l'avant. Dans le tableau sociétal iranien, c'est l’État islamique qui occupe une place indue. Il vaut mieux retoucher ce tableau et effacer cette tache. 
       

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